Hôtellerie: Le casse-tête de l’IR sur les pourboires

Même si la pratique a disparu depuis longtemps, le personnel des hôtels en contact avec la clientèle est toujours supposé percevoir des pourboires imposables à l’IR (Ph. L’Economiste)
C’est un sujet qui donne du fil à retordre aux opérateurs de l’hôtellerie. De nombreux établissements se voient redresser au titre de l’IR sur les pourboires considérés comme ayant été perçus par les employés en contact avec la clientèle. «Les employeurs du secteur sont contraints de payer l’IR sur ces revenus sans jamais les avoir perçus. L’administration fiscale peut réintégrer jusqu’à 10% du chiffre d’affaires de l’ensemble des points de vente dans l’assiette de calcul de l’IR sur salaire», explique Boujemâa Najimi, SG de l’AIH de Marrakech. Il est aussi membre de la Fédération nationale de l’industrie hôtelière. Pour déterminer la base imposable, le fisc s’appuie sur l’article 58 du Code général des impôts. Il tient compte du chiffre d’affaires de l’ensemble des points de vente de l’hôtel, tels que le restaurant, le bar, la boîte de nuit… et procède à un prélèvement de l’IR sur 10% du chiffre d’affaires, censés représenter les pourboires. L’article 156 du CGI oblige les employeurs à appliquer une retenue à la source sur ce «complément de revenu». A chaque contrôle, l’IR sur les pourboires focalise l’attention des vérificateurs. Ce qui est ressenti comme une injustice par les opérateurs.
La Fédération nationale de l’industrie hôtelière (FNIH) rappelle que «l’impôt sur le revenu» appliqué aux pourboires était prélevé à une époque où c’était la seule rémunération des employés. Ces pourboires étaient directement centralisés par les employeurs qui procédaient par la suite à leur répartition. «C’est une pratique qui n’existe plus. Les employés, qu’ils soient en contact avec les clients ou non, sont liés à leur employeur par un contrat de travail qui prévoit le versement d’un salaire mensuel. De plus, les hôtels n’ajoutent pas de «frais de service» au niveau de leur facture comme c’est le cas dans d’autres branches d’activité», signale Abdelaziz Samim, directeur de la FNIH. Ceux qui le font constituent une infime minorité. Il s’agit des chaînes internationales de l’hôtellerie.
Depuis quelques années, les modes de paiement ont beaucoup changé. La majorité des clients étrangers paient d’avance leur séjour à leur tour opérateur ou agence dans leur pays d’origine. Du coup, il n’y a plus de circulation de cash. Au moment de leur départ, les clients remettent «rarement» un pourboire à la caisse. Et même quand c’est le cas, cela ne représente pas un enjeu majeur par rapport au chiffre d’affaires global du point de vente considéré par le fisc. En outre, il est impossible d’en appréhender le montant. «C’est au niveau de cette appréciation que se situe l’injustice car le vérificateur intègre tous les points de vente de l’hôtel», précise Samim. L’intégration des pourboires dans l’assiette est un problème qui se pose lors de chaque vérification fiscale. Outre l’hôtellerie, il concerne également les restaurateurs, les loueurs de voitures, les propriétaires de salles de cinéma, les sociétés de sécurité… et toute autre activité dont les employés perçoivent un pourboire. Contactée par L’Economiste, l’administration fiscale est restée injoignable. Un litige similaire opposait les professionnels de l’hôtellerie à la CNSS. Mais les deux parties ont fini par trouver un terrain d’entente. Ainsi, depuis le 13 juin 2002, en vertu de la loi 20-02, les pourboires versés au personnel des hôtels et des résidences touristiques classés sont exclus de l’assiette des cotisations.
L’industrie hôtelière souhaite que la même «jurisprudence» soit appliquée par l’administration fiscale. Une proposition d’amendement visant l’exclusion du personnel hôtelier du champ d’application de l’IR sur les pourboires a déjà été formulée à plusieurs reprises, sans succès. La Fédération compte revenir à la charge, via la Confédération nationale du tourisme (CNT) et la CGEM, lors de la préparation du projet de loi de Finances 2017. Cette fois-ci, elle mise sur la capacité de persuasion du groupe parlementaire du patronat pour faire passer la proposition.
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